Chronique des confins

Jean-Paul Deléage, Estienne Rodary
2010 Ecologie & politique  
Distribution électronique Cairn.info pour Presses de Sciences Po. © Presses de Sciences Po. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit,
more » ... est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © Presses de Sciences Po | Téléchargé le 21/12/2020 sur www.cairn.info (IP: 207.241.231.83) © Presses de Sciences Po | Téléchargé le 21/12/2020 sur www.cairn.info (IP: 207.241.231.83) Le choc sportif Alors que l'Afrique du Sud, comme le reste de la planète, peine à sortir des effets de la crise financière de 2008, le sujet a subitement disparu des médias nationaux. Un autre bouleversement majeur arrive en effet sur le sol africain : pour la première fois de son histoire, la Coupe du monde de football se déroule en Afrique. Voir venir le « plus grand événement sportif au monde » sur le continent, c'est assister à la création et à l'instrumentalisation de l'idéologie du développement. L'ensemble des commentateurs, en Afrique comme dans le reste du monde, ont plongé dans la rhétorique développementaliste comme si la réussite ou non de la Coupe du monde pouvait définitivement sceller le destin politique et économique du pays. Les tonnes de bétons nécessaires à la fabrication des stades, les parkings et les autoroutes qui vont avec, ainsi que le contrôle des foules sont devenus les uniques mesures de développement. À en croire les médias, que l'Afrique du Sud peine à gérer 100 000 personnes autour de Soccer City, ou échoue à vendre ses tickets à Nelspruit (stade de 41 000 places pour 118 000 habitants) et le pays versera dans le plus extrême sous-développement. Que la compétition se déroule sans incident, et le pays pourra conforter son statut de pays émergent : « C'est en tout cas un pays imaginaire que nous fêtons -uni, bien gouverné et compétitif [1] ». Une telle focalisation sur des travaux de bétonnage que plus personne, à l'exception de la Chine, n'oserait engager pour autre chose que le sport, en dit moins sur un supposé développement du pays que sur les intérêts de ceux que ces travaux servent. Entrepris à marche forcée, ces travaux se sont élevés à 40 milliards d'euros depuis 2004 (prouvant du coup que si la volonté politique est là, des travaux d'infrastructure de grande envergure peuvent être faits dans les temps) pour des revenus prévus de 5 à 9 milliards d'euros. Il fallait alors bien dépasser le simple statut de pays hôte d'une manifestation sportive pour justifier de telles dépenses, dans un pays où 50 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Car voir venir la Coupe du monde en Afrique du Sud, c'est surtout observer l'obscénité d'une propagande qui se déploie autour de l'évé-Écologie & Politique, n° 40, juin, 2010 © Presses de Sciences Po | Téléchargé le 21/12/2020 sur www.cairn.info (IP: 207.241.231.83) © Presses de Sciences Po | Téléchargé le 21/12/2020 sur www.cairn.info (IP: 207.241.231.83)
doi:10.3917/ecopo.040.0005 fatcat:eap6ctelufeshju4sb23dlxmra