Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable

more »

... et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. La petite fille qui cherchait un lieu où habiter en elle J'ai d'abord vu Mallory dans son ancienne classe, une clis 1, « tout venant » alors que celle sur laquelle je venais d'être nommée était encore profilée « troubles psychiques avec ou sans troubles du comportement ». Elle est venue me parler, me toucher, se coller. Elle m'a dit « t'es belle, je t'aime » comme aurait pu le faire un petit de la maternelle. Mallory avait 10 ans. J'ai entendu une voix qui ne semblait pas la sienne, haut perchée, geignarde, à la limite de la rupture, une fillette qui passait du fou rire aux larmes capricieuses avec une facilité déconcertante. Dans la cour, c'était une gamine qui ne cessait pas de tourner, de rouler, de hurler. « Totalement hystérique », a dit le directeur. J'ai entendu et vu chez les adultes le mélange de pitié, d'exaspération et surtout de dégoût qui s'était installé. L'enseignante ponctuait son portrait par des « désolée, ce n'est vraiment pas un cadeau ! » L'usure et la répulsion, physique et morale (car il n'y a pas loin des émotions au jugement moral), avaient conduit à une décision de changement de clis. « Mais c'est en hôpital de jour qu'elle devrait être, elle est complètement folle. » En dehors des renseignements administratifs, j'avais simplement noté pendant cette visite : « Mallory : histoire de la petite fille qui cherchait un lieu où habiter en elle. » C'était un message pour moi-même mais qui m'était totalement mystérieux. Je lui accordais pourtant une valeur de vérité. Claudine Ourghanlian, enseignante spécialisée en classe d'inclusion scolaire.