LÉGISLATION
André PEPY
1933
La houille blanche
On sait quel est* à l'heure actuelle, le régime des permissions de voirie en matière cle distribution d'énergie électrique. Le ]oi du 27 février 1925 qui a modifié sur ce point la loi du 1B juin 1906» a posé, à cet égard, trois principes fondamentaux, Il faut tout d'abord distinguer* suivant que la circulation de l'énergie électrique a lieu dans l'intérêt exclusif du producteur, pf exemple entre une usiîiê de production et une usine d'util jigation appartenant au même individu ou à la même
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... té, ou suivant qu'elle est faite en vue de la fourniture difecte ou indirecte au public. C'est seulement daris le premier cas que les permissions sont accordées sans aucune restriction quant à la puissance transportée* ou Sans condition particulière de tarification ou de fourniture de l'énergie. Second principe : Lorsqu'il s 5 agit de lignes ayant pour objet la fourniture directe ou indirecte au public» la permission de voirie ne peut être aecordée que si la puissance transportée est inférieure à 100 kW. Cette puissance est d'ailleurs calculée fiôn par rapport à la ligne pour laquelle la permission de voirie est sollicitée, mais par rapport à l'ensemble des lignes qui for ment un même réseau de distribution. Par exemple, un distrL buteur qui, dans une comm-Une, aurait déjà un réseau trans portant 500 kW., ne pourrait adjoindre à ce réseau une nou velle ligne pour laquelle il solliciterait une permission de voirie* sous le prétexte que cette ligne transporterait moins de 100 kW. Le Conseil d'Etat a faît application de ce principe dans un arrêt du 7 novembre 1930 (Soc. d'Electricité et Gaz des Pyrénées). Ën troisième et dernier lieu, lorsque la puissance transportée est inférieure à 100 kW. et toujours daiis le cas de fourniture directe ou indirecte au public, l'article 4 de la loi de 1925 prévoit que la permission devra imposer au distributeur des tarifs niaximà et pourra l'obliger à fournir le courant sur tout le parcours de la distribution. Ce sont là des règles qui ont pour effet de rapprocher le régime de la permission de voirie du régime de la concession* On voit qu'une des difficultés principales soulevées par là mise en application de ce régime consiste dans la définition des termes employés par la loi ; distribution ayant pour objet de fournir directement ou indirectement au public. Fourniture directe ou indirecte, cette expression ne soulève pas de diffi culté particulière ; mais il n'en est pas de même en ce qui con cerne la définition du mot « public ». On peut, en effet, se faire du mot « public » deux conceptions différentes. Dans un sens étroit et précis, on dira qu'il y a « public » dès qu'il y a groupe indéterminé de personnes plus ou moins nom breuses, mais qui ne peuvent être désignées nommément et qui peuvent s'étendre en nombre indéfini. On dira alors qu'il y a fourniture au public lorsqu'il y a fourniture à un cercle de personqui, en fait, peut être plus ou moins étendu, mais qui n'est Pas limité et dans lequel on peut entrer librement ou dont on Peut sortir à son gré. Il semble bien, d'ailleurs, que ce soit cette acception du mot « public » qui ait été adoptée par la Cour de Cassation» dans un arrêt du 3 décembre 1923 (Société l'Est Electrique c. Bardin, DalLhébd. 1924» p. 108). La Cour de Cassation déclare qu'une distribution d'énergie électrique constitue un service piibiic» dès lors que, faite en vertu d'une concession, elle comporte l'obligation de fournir le courant à toute personne qui le demande. La Cour de Cassation appuyait sa décision en particulier sur un attendu très intéressant ; « Il importe peu qu'en fait une cate en gorie particulière d'habitants, telle que les industriels, ait « actuellement» seule, trouvé avantage à user de la fourniture « assurée par la concessions si toute personne demeure investie « du droit de la réclamer par la suite, suivant ses besoins. » On voit immédiatement l'idée directrice qui a inspiré les juges de la Cour de Cassation : il y a << public » dès qu'il y a un groupe indéterminé d'individus pouvant s'étendre indéfi niment sans que le distributeur puisse en limiter le nombre. Appliquons cette notion au régime des permissions de voirie at nous dirons qu'une distribution a pour objet la fourniture eu public dès que le nombre et la qualité des acheteurs éventuels de courant ne sont pas rigoureusement et strictement limités. Au contraire» chaque fois que l'acheteur de courant sera désigné nommément dans la permission de voirie ou chaque fois que le groupé des acheteurs éventuels ne sera pas susceptible d'ex^tension et aura reçu une qualification très nette, on ne pourra pas dire qu'il y a vente au public. Mais on peut donner au mot « public » un autre sens et dési gner par là toute personne autre que le producteur. En prenant le mot « public » dans cette acception, il y a vente au public dès t}ue l'acheteur de courant constitue juridiquement une pèî> sonne distincte du producteur. Peu importe qué le nombre des usagers soit rigoureusement limité ou que leur personnalité soit désignée d'une façon précise et exclusive : l'autorisation ne fùi> elle accordée que pour la fourniture de courant à une seule personne désignée d'une façon expresse et limitative, du moment que cette personne est juridiquement distincte du producteur, il y a fourniture au public. Un exemple concret fera mieux saisir notre pensée : une Société industrielle donne le logement à son Directeur, ce logement étant séparé de l'usine par une voie publique, et elle lui vend le courant dont il a besoin pour sa lumière ou pour son chauffage, courant qu'elle amène au moyen d'une ligne franchissant la voie publique. Pour cela, une permisson de voirie est nécessaire, Si nous nous référons à la première définition du mot « public », nous soutiendrons que Û permission de voirie peut être accor dée sans aucune difficulté et sans qu'il soit nécessaire de la sou mettre à des conditions de tarification. Si, au contraire, nous employons le mot « public » dans sa seconde acception, nous dirons que le Directeur constitue une personne juridique diffé rente de la Société et que, par conséquent, il y a fourniture au public. Dès lors, la permission de voirie ne pourra pas être Article published by SHF and available at
doi:10.1051/lhb/1933025
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