Deuil des héros antiques

Roseline Bonnellier
2013 Topique  
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L'adresse du mythe dont l'homme est devenu le héros au cours des siècles change catégoriquement du moment que sa partie « divine » se retire dans l'histoire de l'humanité. Ce qui change, c'est le « destin » des hommes. Les dieux immortels n'ont pas de destin, contrairement aux mortels que sont les êtres humains. IL y A « MyTHE » ET « MyTHE » une psychanalyste de ma connaissance disait un jour à sa patiente : « Si dieu n'existait pas, il faudrait l'inventer. » je ne suis pas sûre que cette analyste, un peu « supposée savoir » tout de même, ait entièrement « raison », si tant est Antériorité de la nature dans le mythe du héros, fondateur de « la » culture Sur la succession des générations divines, il faut faire référence à Hésiode. Et il faut qu'avec ce poète, le « Temps », Chronos, commence d'être « compté » ou entre en ligne de compte. C'est ce que « remarque » profondément Hölderlin, traducteur des tragédies de Sophocle, dans ses Remarques sur Antigone. Le « zeus » d'Antigone n'est pas celui de Créon : dans son « Idéal-du-moi », comme on le retraduirait en psychanalyse, le « zeus » d'Antigone est plus « originaire » ; il remonte dans le mythe grec à la génération précédente des Titans, où l'idée de paternité est seulement en train de naître avec « le temps ». Par le meurtre du plus « jeune » des Titans, Cronos couplé, « au niveau de la langue » (naturelle : en grec et par jeu de mots homophonique), avec Chonos, le « Temps », zeus devient « après coup » (nachträglich) le « père » en second lieu, c'est-à-dire le « fils », de celui qui n'existe pas encore au « Nom-du-père » (dans l'interprétation lacanienne de l'OEdipe freudien). Encore faut-il qu'il y ait eu « avant coup », dans le mythe des origines d'un « Fils de l'Homme » futur, la « castration » d'ouranos de la « génération » antérieure opérée par Cronos avec la faucille prêtée par Gaïa, la Terre. Au sein du mythe grec des origines de « l'Homme », le mythologue verrait plutôt apparaître un mythe « ouranien » 13 qui prend le pas en accédant au « pouvoir » sur « l'autre » plus terrestre, lequel l'aura permis, et dont il se dégage progressivement, mais dont il « revient » dans le temps. Le / la Sphinx au corps ailé et composite qui pose l'énigme de « l'homme », d'après la « réponse » d'OEdipe à la devinette dans sa version « anthropomorphe » la plus connue, est un « monstre ». Pierre Grimal observe que tous les monstres viennent de la Terre, Gaïa. L'étymologie de Homo, l'être humain, est : « né de la terre ». La « religion du père » qu'analyse Freud dans son Moïse et la religion monothéiste où le héros de ce roman historico-psychanalytique est d'origine égyptienne en référence au mythe solaire d'Akhenaton est un mythe ouranien qui s'est « personnalisé » au « masculin » du « genre » arrivé « le premier », en quelque sorte « à la course » héroïque du temps. Toujours dans les Remarques sur les traductions de Sophocle, Hölderlin voit dans Antigone une « course », tandis qu'OEdipe tyran est un « pugilat », Ajax un « duel ». Le mot allemand Trauerspiel pour la « tragédie » signifie littéralement « jeu du deuil », parce que ces « pièces du destin » étaient données aux jeux pour chanter le « deuil des héros » et célébrer leur gloire « immortelle ». RoSELINE BoNNELLIER -dEuIL dES HéRoS ANTIquES 107 13. Sur la notion de « mythes ouraniens » et de « hiérophanies solaires », je me réfère à éliade, M., Traité d'histoire des religions, Paris, Payot, 1986 (© Payot, Paris, 1964. Roseline Bonnellier -Deuil des héros antiques Résumé : Le héros est à l'origine un « demi-dieu ». Lorsque les dieux antiques se retirent, il perd l'adresse divine à laquelle le reliait sa gloire « immortelle ». Le destin de l'homme, ce « héros », change catégoriquement. Il nous faut nous en retourner dans le « temps » qui est plus « proprement » le nôtre, sur terre. Mais le deuil des héros antiques est « infini ». Le « complexe » descend du « mythe » tragique d'OEdipe. Mots-clés : Héros -dieu(x) -Mythe -OEdipe -Temps. Roseline Bonnellier -The Mourning of Ancient Heroes. Abstract : The hero was originally a 'demigod.' when the ancient gods withdrew, the divine address to which the hero was linked through his 'immortal' glory was lost. The destiny of man as a 'hero' thereby changed radically. we had to return to the 'time' that was more strictly speaking our 'own', on earth. yet the mourning of the ancient heroes is 'infinite.' This 'complex' is passed down to us through the tragic 'myth' of oedipus.
doi:10.3917/top.125.0099 fatcat:7qasbsr4ifffxoqf2m2r43qksq