Présentation

Pascale Trévisiol, Rebekah Rast
2006 Acquisition et interaction en langue étrangère  
Pascale TRÉVISIOL et Rebekah RAST Cette livraison d'AILE rassemble des travaux concernant l'acquisition d'une troisième langue (ou langue 3), et contribue à mieux situer ce domaine de recherche relativement récent dans la Recherche sur l'Acquisition des Langues (RAL). Nous adoptons ici la terminologie proposée par Williams et Hammarberg (1998) et précisons que la numérotation 1, 2, 3 concerne l'ordre chronologique d'acquisition des langues concernées, et non le degré de compétence du locuteur
more » ... ns ces langues. Le terme 'langue 3' (L3) renvoie d'une manière générale à la langue en cours d'acquisition au moment de l'observation. Il ne s'agit donc pas nécessairement de la deuxième langue étrangère et elle peut être précédée de plusieurs langues secondes (L2), terme employé au sens large pour toute autre langue acquise après la langue première (L1), et qui ne constitue pas la langue cible (LC). L'appellation 'langue 4' (L4) est parfois utilisée lorsque l'étude prend en considération les trois langues déjà acquises par l'apprenant ou en cours d'acquisition (cf. Muñoz dans ce numéro). La RAL est riche en travaux portant sur l'acquisition d'une langue seconde, mais il existe encore peu d'études traitant de l'acquisition d'une L3. Ce domaine était jusqu'alors assimilé ou du moins traité en parallèle avec l'acquisition d'une L2, autrement dit les chercheurs recouraient aux mêmes outils méthodologiques que s'il s'agissait d'une seconde langue. N'était par conséquent considérée qu'une seule langue source, la L1, ce qui revenait à dire que le rôle de la ou des langues 2 était négligeable. La recherche sur l'acquisition d'une L3, parfois sous le terme de 'multilinguisme', a connu d'importants développements ces dernières années (cf. par exemple Cenoz & Genesee, 1998 ; Cenoz & Jessner, 2000 ; Edwards, 1994) , liés à un regain d'intérêt pour les situations où plusieurs langues sont utilisées et pour la façon dont elles influencent le processus d'acquisition. On a cherché à modéliser le processus de production langagière chez les locuteurs plurilingues (cf. de Bot, 2004) , à décrire les spécificités de la compétence trilingue par rapport à la compétence bilingue (cf. Hoffmann, 2001 ; Cenoz, Hufeisen & Jessner, 2001) . L'acquisition d'une L3 est un phénomène plus complexe que celle d'une L2 parce que le processus d'acquisition d'une L2 et le produit de cette acquisition vont constituer des sources potentielles d'influence. De plus, les apprenants polyglottes sont des apprenants qui ont, du fait de leur expérience linguistique, une plus grande flexibilité cognitive et une conscience métalinguistique plus aiguë que les apprenants d'une seule langue étrangère (cf. Klein, 1995) . L'intérêt pour l'acquisition d'une L3 a des fondements sociolinguistiques et psycholinguistiques. La perspective sociolinguistique met l'accent sur le statut des langues (officielle, minoritaire, ...) et sur les types d'interaction dans lesquels interviennent les locuteurs. Nous n'évoquerons pas ici les politiques linguistiques dans les pays bi/plurilingues, ni la complexité des situations multilingues dans certaines régions du monde, entre autres en Afrique où les langues en contact ont divers statuts : langue nationale, locale, communautaire, mais aussi interafricaine, etc. La problématique de ce numéro se limite à l'acquisition d'une langue 3 chez des adolescents et des adultes -élèves, étudiants, voire enseignants -évoluant dans un milieu institutionnel et bénéficiant par conséquent d'une certaine sensibilité métalinguistique. L'acquisition de la langue étrangère (LE) se déroule en situation guidée ou semi-guidée, ce qui implique la non prise en compte de facteurs sociolinguistiques spécifiques à toute interaction en milieu naturel. Par ailleurs, le terme 'L3' renvoie à la présence de 3 langues chez un même locuteur. Cependant, nous ne prétendons pas couvrir dans ce numéro tous les domaines du trilinguisme. Si notre perspective est psycholinguistique, nous ne traiterons pas pour autant du trilinguisme précoce ni de l'acquisition simultanée de 3 langues chez l'enfant (cf. Hoffmann, 1985). Les notions d'influence translinguistique et de transfert sont au coeur de ce volume. La présence de 'marques transcodiques' dans le discours de l'apprenant reflétant l'influence de sa/ses langue(s) première(s) et/ou seconde(s) est considérée comme une « mise à contribution de ressources complémentaires. » Dans notre perspective, l'alternance codique est « à la fois
doi:10.4000/aile.4942 fatcat:ya5ac3a3xjet5al4f7wuy5yl5y