Frères ennemis : l'armée et la nation en Inde et au Pakistan

Jean-Luc Racine
2005 Hérodote  
Yves Lacoste. Il y a peu d'exemples dans le monde d'aujourd'hui où, comme dans le cas de l'Inde et du Pakistan, deux armées sont, depuis très longtemps, en relation antagoniste. La rivalité entre les États-Unis et l'URSS, ou celle, très différente, qui opposa l'Inde et la Chine, n'ont pas eu le même caractère. Jean-Luc Racine. Ce n'est pas le cas non plus des deux Corées, indépendamment des espoirs placés par Séoul dans la « sunshine policy » (politique de normalisation diplomatique), puisque
more » ... Corée du Sud, qui entretient pourtant, comme la Corée du Nord, une armée très nombreuse, a largement sous-traité sa défense, en accueillant sur son sol de très fortes troupes américaines. S'agissant de l'Inde et du Pakistan, nous sommes effectivement dans un cas de figure très particulier, héritage direct de la partition de 1947, lorsque l'Empire britannique des Indes plie bagage. La partition a été sanglante, et très vite la question du Cachemire a mené à la confrontation entre les deux nouveaux États qui, faute de normaliser durablement leurs relations, se sont dotés d'armées considérables : le Pakistan, pour faire face à l'Inde, et celle-ci, dans un horizon plus vaste, pour ne pas connaître de nouveau l'humiliante défaite subie face à la Chine, en 1962. Aujourd'hui, en termes d'effectifs, l'armée indienne est la troisième du monde (juste devant la Corée du Nord), et l'armée pakistanaise la septième (juste derrière la Corée du Sud). En termes de budget (sujet à caution ou à interprétation), l'Inde est neuvième, le Pakistan, trente-deuxième, un différentiel qui s'accroît avec la montée en puissance de l'Inde. Autre paramètre décisif, officialisé par les essais de mai 1998, ces deux armées antagonistes sont aussi, pour partie, nucléarisées.
doi:10.3917/her.116.0150 fatcat:tb7iqbx45rgzvjjzqbma7idbci