Identité et parentés en Sicile
Salvatore D'Onofrio
2000
L'Homme (En ligne)
Référence électronique Salvatore D'Onofrio, « Identité et parentés en Sicile », L'Homme [En ligne], 154-155 | avril-septembre 2000, mis en ligne le 18 mai 2007, consulté le 06 janvier 2017. URL : http://lhomme.revues.org/32 ; DOI : 10.4000/lhomme.32 Ce document est un fac-similé de l'édition imprimée. © École des hautes études en sciences sociales A THÉORIE de l'alliance (Lévi-Strauss 1945 , 1949 s'appuie essentiellement sur le double caractère, universel et normatif, de la prohibition de
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... ste ainsi que sur la notion de l'atome de parenté qui l'explique. Ces éléments se sont enrichis depuis les recherches récentes sur les grilles conceptuelles qui relèvent, d'une part, de la constitution biologique du corps et de son inscription dans le monde naturel et social et, d'autre part, de la tendance complémentaire et inverse, mais également nécessaire au fonctionnement du champ parental, à purifier de toute substance matérielle les relations entre les hommes et leurs corps -une sorte de « spiritualisation de la chair », pour emprunter l'expression d'Élisabeth Copet-Rougier (1995). À ce propos, on constate qu'aux trois relations qui composent l'atome de parenté, à savoir l'alliance, la filiation et la consanguinité, correspondent les trois invariants identifiés par Françoise Héritier dans tout système de parenté : la conjonction nécessaire des deux sexes, l'enchaînement irréversible des générations, la succession ordonnée des naissances. Ces « butoirs de la pensée » ont été enrichis par la théorie de Françoise Héritier. L'inceste du deuxième type entre « deux consanguins de même sexe qui partagent un même partenaire sexuel » (Héritier 1979 : 219) a montré comment la prohibition de l'inceste tient non seulement à la nécessité de l'échange, mais aussi au souci de cohérence que chaque culture met en oeuvre dans la circulation des fluides entre les corps à partir des catégories de l'identique et du différent ; le symbolique dont on affirme le primat est en effet « ancré dans ce qu'il y a de plus physique dans l'humanité, à savoir la différence anatomique des sexes, vue par les yeux, triturée par l'esprit de l'humanité, ainsi que celle, physiologique et perçue par les sens, des différences ou des similitudes des liqueurs qui sourdent des corps » (Héritier 1997 : 21) . Les manipulations symboliques par lesquelles les cultures humaines interviennent sur ces données biologiques de base, en essayant surtout de résoudre la coexistence ambiguë dans la relation sexuelle entre le plaisir et la procréation, trouvent dans la prohibition de l'inceste leur limite infranchissable, non seule- LE CORPS EN HÉRITAGE L' H O M M E 154-155 / 2000, pp. 225 à 240 Identité et parentés en Sicile Salvatore D'Onofrio L «Le village est tout env eloppé d'un réseau de chaînes compliquées qui ne sont pas seulement celles, matérielles, de la parenté [...] mais aussi celles, symboliques et acquises, des comparaggi. Le compère de saint Jean est presque plus qu'un frère charnel, grâce à un choix et à une initiation rituelle, il appartient réellement à la même famille que vous ; à l'intérieur de celle-ci, on est sacré l'un pour l'autre, on ne peut pas se marier ensemble. » Carlo Levi, Le Christ s'est arrêté à Eboli.
doi:10.4000/lhomme.32
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