La pente glissante. Hayek et la justice sociale

Yannick Lacroix
unpublished
Ce texte est dédié à Mario Dumont : « Parce que je veux faire ma place. » F. A. Hayek (1899-1992) est l'un des principaux instigateurs du renouveau libéral qui, à l'heure actuelle, redessine en profondeur notre paysage politique en dissolvant les structures social-démocra-tiques érigées progressivement au cours du XX e siècle. Fondateur de la société du Mont-Pèlerin, initiateur des think-tanks, Hayek est aussi l'un des penseurs les plus profonds du néolibéralisme. Il jette un défi redoutable à
more » ... ous les avocats de la justice sociale (qu'il qua-lifie d'« incantation creuse » et d'« incube 1 ») et à tous les tenants d'une intervention gouvernementale destinée à abolir ou réduire les inégalités économiques. Nous nous concentrerons ici exclusivement sur la destruction méthodique du concept de justice sociale à laquel-le se livre Hayek à travers son oeuvre et qui en fournit l'un des motifs principaux. Sa thèse est que ce concept ne possède aucun sens dans notre civilisation et relève d'une erreur intellectuelle. Cette thèse est fondée dans une ontologie du fait social que nous devrons d'abord déblayer rapidement. L'ordre spontané L'idéologie de la justice sociale est fille du socialisme. Elle aspire à une redistribution égalitaire de la richesse sous prétexte que la distribution opérée par le marché serait injuste. Mais de l'avis de Hayek, cette noble intention ne peut dans les faits se traduire que par son contraire, c'est-à-dire l'injustice, et cela parce qu'elle repose sur des prémisses erronées qui attribuent à la société une nature qui n'est pas la sienne et des attributs qu'elle ne possède pas. La société est la somme non intentionnelle des relations entre hommes, ceci est un fait que Hayek tient pour évident et il déplore fortement que celui-ci soit presque systématiquement laminé dans Phares 115
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