Veillées delémontaines

André Rais
1945
A temps où nos étïn djuenats Les Boueb's v'nyïnt djasaie es baichattes; Le soi, tot atoé di foinat, Les fannes f'sint tehaintaie yos f'lattes! Au temps où nous étions jeunets, Les garçons venaient parler aux fillettes; Le soir, tout autour de chenets, Les femmes faisaient chanter leurs rouets !J) Fin XVIe siècle. Une randonnée, dès la tombée de la nuit, à travers Delémont, petite ville episcopale et cancanière, blottie sur 200 mètres de côte! Le guet ne vient-il pas de chanter dix heures? Pas
more » ... bruit. Une lune blanche éclaire la pittoresque cité qui va s'endormir... Sortent alors des maisons, ici ou là, un jouvenceau, une jouvencelle, tenant dans leur main une bougie ou une lanterne de bois. Bravant les défenses sévères du conseil, ils savent pourtant que «ceux qui seront trouvés sur la rue passé les 9 heures du soir, sans juste cause, sont punis de 15 sous» 2). Ils se rappellent sans doute que leur compagnon Hartmann Burgi a même été condamné, pour ce fait, à huit jours de prison, dans la tour des Moulins3). Ils doivent se remémorer l'ordonnance du conseil qui oblige le guet à dénoncer «tous ceux qui oultre les neufs heures du soir, battent le pavé de nuict»4). Et cependant, nos jeunes bourgeois et bourgeoises ont déjà refermé la porte de la maison familiale. En allant à la veillée. Esprits frondeurs, ces jeunes citadins prétendent avoir oublié les nombreuses décisions du conseil, publiées dix, vingt, voire trente fois l'an: «On défendra les déguisés ou masques»5), ou: «les masques qui vont de nuit par la ville sont défendus»6), ou encore: «les
doi:10.5169/seals-114119 fatcat:6i6yk7gzdzgylogjunplmdkwme