Neurologie: Anticorps monoclonaux anti-CGRP: des «game changers» dans la prophylaxie de la migraine?

Peter S. Sandor, Andreas R. Gantenbein, Heiko Pohl, Urs Fischer
2019 Swiss Medical Forum = Forum Médical Suisse  
Bien que la prophylaxie de la migraine existe déjà depuis longtemps, aucune avancée majeure n'a été observée jusqu'à présent. Aujourd'hui, des médicaments biologiques développés spécifiquement pour cette indication font leur apparition. Qu'apportent-ils? Contexte La prophylaxie de la migraine n'est pas une entreprise facile. La multitude de classes de substances employées amène à conclure qu'aucune d'entre elles n'apporte un bénéfice suffisant pour les personnes sévèrement atteintes. Dans le
more » ... sé, les agents prophylactiques contre la migraine avaient plutôt tendance à être découverts de façon fortuite. Les bêtabloquants, par ex., ont d'abord montré un effet prophylactique contre la migraine en tant qu'«effet secondaire» et n'ont été étudiés de façon systématique que par la suite. Cette situation a changé lorsque des modifications de la concentration sérique de «calcitonin gene-related peptide» (CGRP) au cours des crises de migraine ont été décrites à la fin des années 1980 [1]. Sur la base des connaissances acquises dans le cadre de ces études physiopathologiques, des antagonistes dirigés contre des composantes du système CGRP ont alors été développés pour le traitement de la migraine. Nouvelles approches thérapeutiques avec «gepants» et anticorps monoclonaux Dans un premier temps, des antagonistes du CGRP ont été évalués pour le traitement des crises migraineuses. De petites molécules appelées «gepants» ont montré une efficacité similaire à celle des triptans, tout en étant mieux tolérées [2]. Elles ne présentaient pas d'effet vasoconstricteur, si bien qu'elles pouvaient être employées chez les patients avec antécédents vasculaires. Par ailleurs, aucune chronicisation n'a été observée en cas de prise quotidienne d'un «gepant» en tant que traitement prophylactique [3], ce qui rend dès lors improbable l'apparition de céphalées par abus médicamenteux avec cet anticéphalalgique d'action aiguë. Toutefois, une certaine hépatotoxicité, qui a été interprétée en tant qu'effet de classe potentiel, a été observée dans le cadre des études [3]. Les entreprises concernées n'ont en conséquence plus poursuivi le développement de ces médicaments pendant une longue période. Ce n'est que récemment que de nouveaux «gepants» ont été évalués pour le traitement aigu dans le cadre de nouvelles études cliniques, et ils n'ont pour l'heure montré aucune hépatotoxicité. Les résultats définitifs ne sont toutefois pas encore disponibles. Un nouveau développement prometteur est celui des anticorps monoclonaux (AcMo) utilisant le système CGRP en tant que mécanisme. Quatre substances ont été étudiées, dont trois se lient au ligand CGRP (eptinezumab, fremanezumab, galcanezumab) et un au récepteur CGRP (erenumab). Selon la substance, l'administration s'effectue par voie sous-cutanée ou intraveineuse tous les 1-3 mois. La première préparation autorisée, l'erenumab, est disponible sous forme d'auto-injecteur pour une utilisation à domicile. Contrairement à ce qui est décrit dans la presse non spécialisée, il ne s'agit cependant pas d'une «vaccination», car le système immunitaire n'est pas impliqué. La tolérance de toutes les substances évaluées est excellente et elle est comparable à celle du placebo pour presque tous les effets indésirables. Aucun effet indésirable sur le système nerveux central et aucune hépatotoxicité n'ont été observés.
doi:10.4414/fms.2019.03431 fatcat:l2hutnv3trbm5klbb6bbeffm6m