Le mariage de Grégoire de Nysse et la chronologie de sa vie

J. DANIELOU
1956 Revue d' Etudes Augustiniennes et Patristiques  
Le mariage de Grégoire de Nysse et la chronologie de sa vie U question du mariage de saint Grégoire, frère de saint Basile et évêque de Nysse, a suscité bien des discussions, Heyns, puis Bardenhewer l'ont tranchée de façon à notre avis décisive, contre les éditeurs béné dictins, dans le sens de l'affirmation. Il reste que la question n'a jamais été l'objet d'une étude complète et que par ailleurs elle pose des ques tions subsidiaires qui ne sont pas sans importance. Marié, Grégoire s'est-il ou
more » ... on séparé de sa femme après son élévation à l'épiscopat ? Comment, s'il était marié, concevoir le rôle qu'il a joué dans le dévelop pement du monachisme de Cappadoce ? Ee progrès des études nysséennes permet aujourd'hui de reprendre l'ensemble du problème et d'y apporter quelque lumière. En dehors du témoignage tardif de Nicéphore CaUiste (Hist. Eccl., xi, 29), deux textes autorisent à penser que Grégoire était marié. Ee premier vient de lui-même et se trouve dans son premier ouvrage, le Traité de la virginité. Au chapitre ni, Grégoire compare les avantages de la virginité et les inconvénients du mariage. Avant d'examiner ceux-ci, il écrit : « Plût au ciel qu'il m'eût été possible à moi aussi de posséder l'avantage d'un tel état,. Je m'engagerais alors ayec plus d'enthousiasme dans la tâche que j'entreprends, si je devais m'appliquer au sujet, avec l'espoir, comme dit l'Écriture, d'avoir part aux produits du labourage et du foulage1. Mais en fait ma science des biens de la virginité est en quelque sorte stérile et inutile, comme sont les épis pour le boeuf qui tourne sur l'aire avec une muselière2 ou comme l'eau qui sourd d'une fontaine inaccessible pour celui qui a soif. « Bienheureux ceux à qui le choix du meilleur est encore possible et qui ne s'en sont pas exclus, en ayant adopté auparavant la vie commune, comme c'est notre cas à nous qui sommes séparés, comme par un gouffre de la gloire de la virginité, à laquelle ne peut désormais prétendre celui qui une fois a mis le pied dans la vie du monde. C'est pourquoi nous ne pouvons plus être que les spectateurs des biens des autres et les témoins d'une béatitude étrangère. Et s'il nous arrive d'avoir quelque 1. Citation de I Cor" ix, 10. Cavarnos ne l'a pas notée dans son édition. 2. Allusion à 1 Cor., ix, 8. I I -t>e même chez Grégoire deJNysse pour ovÇvyos {Vie de Moïse, 337 A ; Danielou, p. 41), opôjuyoj {336 D ; 41), ou ov^vyia. (336 D ; 41).
doi:10.1484/j.rea.5.103908 fatcat:kh477rg2kbg3beoqb3jrpwjs6e